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14 septembre 2011

Ne pleure pas sur la lentille

Commis par Maax

Chaque année, c’est la même chose: le World Press Photo débarque, j’y vais, je regarde et je rentre à la maison déprimé. Je n’ai jamais été un cynique, j’ai toujours cru - et je crois toujours - que les choses allaient moins bien avant et que le sort de l’humanité s’est amélioré. Je me dis toujours que le sort de l’humanité ira vers le mieux. À mon sens, l’Histoire a toujours un sens positif. Cependant, chaque année, le World Press Photo me jette un espèce de froid agaçant, avec ses images qui marquent au fer rouge et ses vies qu’on voudrait aider.

Combien de visages en sang et en larmes ai-je vu d’Afghanistan? Beaucoup trop diront nos âmes sensibles, mais d'un autre côté, vue l’ampleur des émois causés par une telle guerre, bien peu. Et le nombre de photos de désastres naturels qui me font regarder le ciel et la terre avec une certaine humilité, une certaine peur... Daniel Berehulak, avec les inondations de l’Indus a réussi à capturer cette peur. Sa photographie, avec l'énorme lumière, l’eau noire et les insectes, aura transmis un désarroi profond jusqu'à moi, dans le musée. L’horreur des inondations au Pakistan aura été un peu plus universelle, ainsi.



Voila le double rôle du photojournalisme: transmette un savoir, transmettre une émotion. Le journalisme existe dans ce monde pour trier un flot infini d’informations, l’artiste existe dans ce monde pour trier un flot infini d’émotions. Le photojournaliste doit concilier les deux, et par conséquent, il doit faire face à des milliers de questions éthiques: payer ou non l’intervenant, aider quelqu’un en danger ou le photographier, participer à l’illégalité, changer les faits ou la lumière pour rendre la photo plus sensible, photographier ou ne pas photographier un cadavre, etc. Le photojournaliste se met tellement au centre de l’information, tellement au centre de l’histoire qu’il finit par devenir invisible devant ces visages et ces formes. C’est à ce moment qu’il devient artiste, qu’il choisit son cadre, sa profondeur de champs, son regard. Je me demande à quel point les questions éthiques subsistent face à l’angoisse du moment, face à la nécessité et à la rapidité d’exécution. La photographie est un art instinctif, et dans le cas du photojournalisme, cet instinct semble se muer avec l’instinct de survie du photographe, mais aussi celui du sujet. Je ne suis pas un journaliste, alors que ceux exerçant cette profession répondent à la question, mais en tant que (futur) artiste, je considère cette forme d’art comme étant la plus noble, la plus accomplie.



Robert Ménard disait que le photojournalisme, surtout celui de guerre, était là pour que les gens sachent. Les gens pouvaient s’en foutre, pouvaient aider, pouvaient rigoler devant les clichés, mais qu’importe, les gens devaient savoir. J’ai su…

… et même si 8 cadres pour décrire la Guerre des cartels au Mexique paraissent si peu, c’est déjà beaucoup.






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