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31 mars 2011

Le retour de Ronfard (ne pas confondre avec Jafar)

Hier soir, par un de ces hasards qui font bien la vie, je me suis retrouvée dans la très malléable salle de l'Espace Libre pour la nouvelle production du Nouveau Théâtre Expérimental (NTE): Ronfard nu devant son miroir. Conjointement écrite et mise en scène par Daniel Brière et Evelyne de la Chenelière, la pièce est née d'un message laissé par Jean- Pierre Ronfard sur le répondeur de Marthe Boulianne, co-directrice du NTE, peu de temps avant sa mort.


Simplement, on nous annonce la pièce ainsi:

Un message téléphonique qui appelle à la délinquance. Les interprétations se multiplient, le sens des possibles éclate, une fantasmagorie poétique se déploie. [...] La démarche s’apparente à l’autopsie d’un message comme fondement d’une dramaturgie. Disséquer le message, jusqu’à le lacérer, prendre le risque de sa disparition pour en interroger toutes les virtualités. [1]
Et fidèle à lui-même, le NTE dissèque, interroge toutes les virtualités. Il farfouille et épuise jusqu'à la dernière goutte sa matière première : Ronfard.

Je vous entends déjà râler: "Bah, à quoi bon aller voir cette pièce. Expérimental... Beurk. Ils vont se mettre à peinturer le sol et les murs de leurs seins nus en criant structure. Et Ronfard, je-sais-pas-qui-c'est-je-m'en-fous-le-théâtre-fucké-ça-me-gonfle."

N'ayez crainte. Ronfard nu devant son miroir est pour vous. Tous demeurent habillé, et nul besoin de connaitre l’œuvre ou même son créateur. En fait, je pousserais même jusqu'à dire que vous présenter en imbécile heureux (c'était ma position, je l'avoue) vous donne un plaisir qui, s'il n'est peut-être pas supérieur à celui des initiés, n'est pas à négliger.

Mais pour les plus studieux, pour ceux qui ne peuvent se présenter quelque part sans avoir lu compulsivement sur l'évènement ou l’œuvre dont il est question, Ronfard nu devant son miroir est également pour vous. Le NTE vous permet de faire vos devoirs en entourant la pièce d'une foule d'images et de vidéo.

Celle-ci est la plus "promotionnelle":


Personnellement, je vous conseillerais d'écouter les vidéo a posteriori. Elles m'ont paru assez obscures avant la représentation et, une fois sur place, je les avais déjà oubliées. Toutefois, en les revisionnant, au retour, j'y découvre (et décode) avec plaisir la structure même de la pièce et me retrouve assaillie d'une myriade de nouvelles pistes de réflexion.

Franchement, Ronfard nu devant son miroir est finement tissée. Malgré une forme éclatée au premier regard - vidéo, caméra, danse, accessoires, cris animaux -, la pièce n'est pas dénuée de structure. Scandés par des moments clés faisant partie de toute vie humaine (naissance, enfance, première fois, mort d'un parent, mariage, paternité, etc.), les différents tableaux de la pièce s’enchaînent les uns aux autres sans que l'on perde le fil (quel fil? On s'en fout.) En plus, l’œuvre s'interroge sur des tas de questions contemporaines comme l'industrie du spectacle, la culture et ses modèles au Québec, etc.

Et détail d'une richesse incomparable à mon sens : On sent que toute la troupe a été impliquée dans le processus de création.

Ronfard nu devant son miroir, c'est ludique, c'est autodérisoire, c'est vibrant.



Notez que Ronfard nu devant son miroir ne présente pas de fer plat dans le cul. Amateurs d'objets étranges insérés dans les orifices du corps, passez votre chemin.

Du 24 mars au 30 avril, à l'Espace Libre, 1945 Fullum.

- Miroir, miroir, dis-moi qui est la plus belle?

- Ô Ronfard, tu es la plus belle en ce royaume.


1 commentaire:

Daphné D. a dit…

Sans écrire tout croche, je te remets un trophée imaginaire (tu ne veux pas me voir faire du bricolage, crois-moi), celui de l'habileté de convaincre (je m'avoue convaincue) celui ou celle qui n'est normalement pas attiré vers l'inconnu, pire, vers l'étrange. Faisons tomber les murs du monde des préjugés! (dit-elle, poingt en l'air, sourcils fronçés et un peu trop déterminée)Aahh...avec nostalgie je repense à ces chorégraphies de danse contemporaine. On me disait: Bravo pour ton spectacle! J'ai rien compris, mais on voyait très bien dans vos yeux que ça vous habitait!
(C'est un début...)