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17 février 2011

Quand la mort nous prend au jeu

Il y a déjà de ça quelques semaines, le 24 décembre pour être d'une précision maniaque, je découvrais, grâce à des collègues, deux jeux vidéo ma foi fort intéressants : Vigilance 1.0 et One chance.

L'un des ces mêmes collègues m'a mis sur la piste d'un autre jeu, qui s'est avéré exprimer parfaitement mon état d'esprit en cette dernière journée de travail de la semaine. Si vous êtes du type workaholic, peut-être avez-vous déjà entendu le mot japonais «karōshi», qui signifie littéralement «mort par sur-travail». Joyeux, n'est-ce pas?

Toujours est-il que, dans la création de son jeu, Jesse Venbrux a pris cette expression au pied de la lettre. Alors que, traditionnellement, dans la majorité des jeux (vidéo, sur table, de cartes - et même de rôles, tiens, pourquoi pas!) le but est de demeurer en vie, eh bien, dans Karoshi, le but du joueur est - bêtement - de mourir. Et plus précisément de se suicider.


Car l'avatar qu'incarne l'internaute (un col blanc japonais) est le seul personnage du jeu. Il ne rencontrera personne d'autre pour lui nuire; il sera son unique danger. Toutefois, même s'il demeure l'ultime exécuteur de ses jours, le joueur jouira malgré tout de l'aide d'un adjuvant pour certains tableaux du jeu. Ce complice, campé par un carré de couleur au visage formé de caractères informatiques (de type smily), lui donne des indices quant à la façon de mettre fin à ses jours. Bien sûr, ce carré rappelle le patron despote, source de tous les maux.


Le jeu est assez bien foutu. La difficulté des niveaux varie; les modalités de suicide également. Et comme le but est la mort, tant qu'on ne l'est pas, on peut retenter notre chance (on ne va quand même pas perdre des vies à essayer de s'en ôter!) Il devient étrangement amusant d'aller se jeter contre des pics ou, plus simplement, de s'électrocuter. C'est le monde à l'envers. On nous force à exister. Nous échouons à mourir : nous sommes frustrés. Notre corps éclate dans un bain de sang : nous jubilons. De quoi faire grincer les dents aux plus cyniques.

Discutant avec tout mon entourage du plaisir qu'avait entrainé la découverte de Karoshi, je me suis mise recevoir une myriade de propositions de jeux vidéo s'inscrivant dans la même veine. C'est environ à ce moment-là que ma coloc m'a parlé de Super Columbine Massacre RPG (SCM RPG). Nul besoin, j'ose espérer, de vous expliquer la teneur du jeu. Bref. Trouvant l'entreprise culottée, j'ai décidé, ce matin, d'y jouer afin de voir si le jeu trouverait sa place dans cette chronique.


Le jeu s'ouvre avec un citation d'André Breton, traduite ainsi: "The purest surrealist act would be to go into a crowd and fire at random". Déjà, je suis agacée. Je ne vois pas en quoi cette citation illustre pertinemment les états d'esprit d'Eric Harris et Dylan Klebold (pour ce que nous en savons, bien sûr...). Et plus j'avance dans le jeu (comprendre "à la vitesse phénoménale de jeu de La Fille"... donc que j'ai passé la matinée à réaliser la première mission : placer les bombes dans la cafétéria) et moins je vois en quoi Karoshi et SCM RPG sont de la même trempe.


Alors j'arrête tout. Oui, je vous force au coït interrompu. J'étais pleine de bonnes intentions, je voulais de tout cœur traiter de SCM RPG, mais devant la lourdeur de la tâche, je fuis. La queue entre la jambe comme un amant déchu, je fuis. Or, n'ayez crainte, je reviendrai, plus vaillante que jamais, pour réfléchir en votre compagnie à ce jeu, pour tenter d'infirmer ou de confirmer le mauvais goût que les premières minutes de jeu m'ont laissé en bouche.

Pour maintenant, notez que Karoshi est disponible - oh joie - sur Iphone et Ipad. Vous pourrez vous garrocher contre des pics acérés même en public! De plus, comme le jeu se souvient de vos progrès, il est aisé d'en prendre momentanément congé, soit parce que vous êtes bloqués ou parce que votre patron louche suspicieusement dans votre direction. Puis de reprendre plus tard, l'esprit reposé et paré à se suicider de nouveau.

Vous savez ce qui me donne aussi envie de m'ôter la vie? Ça :

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