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20 juin 2011

Conduire n'est pas un droit

COMMIS PAR LA TACHE

Au moment où j'écris ces lignes, ce sont huit personnes qui ont perdu la vie sur les routes du Québec, cette fin de semaine. Si j'étais Guillaume, probablement que je sortirais plein de statistiques et d'articles pertinents sur le sujet. Si j'étais Maxouel, je ferais une BD. Mais je suis La Tache, alors je vais chiâler, en commençant par dire ceci. 

Conduire n'est pas un droit, c'est un privilège.


Je suis vraiment tout à fait tanné d'entendre parler d'adolescents qui se tuent, de jeunes conducteurs saouls, de vitesse. Je suis complètement écœuré de la taule détruite, des accidents, des gens qui meurent et des familles décimées que l'on oublie après une ou deux journées. Je n'en peux plus des statistiques qui disent que 18% des accidents avec lésions sont causés par les 16-24 ans. Mais, par dessus tout, je suis tout à fait contre cette idée qui semble être répandue dans nos systèmes, dans nos gouvernements, dans notre société, selon laquelle conduire est un droit qui doit s'acquérir le plus vite possible.

Je vais faire un coming out : je n'ai pas de permis de conduire d'adulte. Je suis encore sur mon temporaire. En fait, j'ai commencé mes cours de conduite à 23 ans. Je vais probablement les finir vers 25. J'ai habité à Sorel pendant 16 ans, là où les autobus ne sont pas comme les bas prix chez Zellers, ils ne font pas la loi. J'ai habité à Boucherville, là où c'est beaucoup mieux, avec les autobus et les métros de Montréal tout près. Là, j'habite à Régina, Saskatchewan, province où il y a plus de voitures que de gens. Pourtant, j'ai survécu et je survis encore. Pourquoi? Parce que je prends l'autobus. Parce que je m'arrange pour marcher beaucoup, je prends mon vélo. Et quand je me suis cherché un appartement, je l'ai cherché à proximité de tout, à pieds.

Où est-ce que je m'en vais, avec ça? 

16 ans, c'est beaucoup trop jeune pour conduire. 18, c'est pas beaucoup mieux. Oh, ça le serait si les tests pour obtenir son permis de conduire n'étaient pas des blagues totales. C'est déjà bien que les cours de conduite soient obligatoires. Mais ils sont faciles. Obtenir son permis va de soi. Bien sûr, on a tous plusieurs amis qui ont échoué une fois, deux fois, puis qui ont réussi. Mais dans l'ensemble, c'est facile, avoir son permis. Ça ne devrait pas l'être.

Une voiture, c'est une arme. Tous les jours, des gens meurent à cause des voitures. Ils meurent plus à cause des voitures qu'à cause des couteaux, des fusils, peut-être, je ne sais pas. Pensez aux gens autour de vous. On connait tous quelqu'un qui ne devrait pas conduire. Parce qu'il est irresponsable, parce qu'il n'aurait aucun remord à conduire chaud. On voit tous ça, à la tivi, des gens qui se font redonner leur permis de conduire après une 2e, 3e, 4e infraction, qui se le font enlever six mois, qui se font confisquer leur bagnole pour 30 jours.

C'est pas assez. 

Conduire, c'est pas un droit. Le permis de conduire, après un certain nombre d'infractions, on devrait pouvoir le retirer indéfiniment. On dit à des gens "Toi, t'es pas safe pour la société, enweille en prison.", on dit à d'autres, "Heille, toé, t'es un addict. Enweille en désintox." comme on interdit à d'autres d'être en présence d'enfants, d'animaux, d'une autre personne. Quelqu'un qui commet un crime au volant, même si c'est un bon père de famille, même si c'est une femme avec une carrière exemplaire, ça devient un criminel. Et un criminel, ça se fait retirer certains privilèges. Je crois que, en tant que société, on ne devrait pas avoir peur d'interdire la conduite à quelqu'un, qu'il soit jeune, vieux, beau ou laid. Et pas juste pour quelques mois, le temps de réfléchir. Et pas après mille infractions. Aussi tôt que la première, si elle est assez grave.

Et je me fous de "j'ai besoin d'une voiture pour travailler, pour avoir une vie, pour me déplacer, pour faire ceci ou cela." Fallait y penser avant. Te déplacer en voiture, même si c'est pour la job, c'est pas un droit, c'est un privilège, et la société devrait avoir le droit de te l'enlever. C'est pas à nous de prendre un risque pour toi et ta job. C'est à toi de t'adapter aux conséquences de tes gestes, deal with it.

Je suis choqué, parce qu'on dirait qu'il y a plusieurs classes de criminels. On commence à peine à muscler les réglementations envers les criminels à cravate. Quand musclera-t-on celle des criminels au volant? Parce que dans ma tête à moi, ne nous méprenons pas, un criminel du volant, quelqu'un qui met en danger la vie des autres, quelqu'un qui prend la vie des autres ou blesse autrui... c'est un criminel au même titre que celui qui tue, blesse ou met en danger les autres avec un gun, un couteau ou une scie tronçonneuse. À quand verra-t-on le même dégoût du pédophile ou du violeur de femme se dessiner dans les yeux des gens lorsqu'ils entendront parler d'un soûlon qui a tué un père de famille avec sa voiture? Enrayer les crimes du volant, c'est d'abord comprendre, en tant que société, qu'ils sont graves. Très graves. 

Je ne crois pas que nous le sachions encore véritablement.


2 commentaires:

Anonyme a dit…

Qu'est-ce tu fais à Regina?!

Bock

Anonyme a dit…

Moi ce qui m'a choqué en fin de semaine c'est que sur les 12 morts (eh oui on a fermé les livres avec 12 dans la colonnes des morts) il y a avait pleins de jeunes. 3 ou 4 d'un coup dans le coin de Drummondville. Tout de suite après, Radio-Canada dans son grand zèle a sauté au reportage disant qu'au moins, à partir de dimanche, une telle chose risquait d'être moins fréquente puisque les conducteurs de moins de 25 auraient moins de points. Ce qu'ils ont oublié de dire c'est que les jeunes décédés étaient des victimes d'un chauffard de 37 ans. Ils sont peut-être impliqués mais à titre d'innocentes victimes. Ça revient à dire que les statistiques démontrent qu'une majorité de femmes sont victimes de viols et que la majorité de ces viols ont lieu la nuit donc on va imposer des sanctions sévères aux femmes violées en espérant que ça diminue le risque de viols. Bravo! Un beau geste de la part des médias.