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25 juillet 2011

Déboulonner des mythes de la Saskatchewan

Commis par la Tache

Ça fait deux mois que je suis en Saskatchewan, et j'entends bien déboulonner certains mythes récurrents dont on me parle ici et là, une fois pour toutes, à propos du coeur des prairies.

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1) Il n'y a pas de mythes à propos de la Saskatchewan

Allez chier, il y en a tout plein -.-

2) Y'a juste au Québec pis au Nouveau-Brunswick qu'il y a du français

Faux. La plupart des gens croient que la francophonie ne s'étend pas beaucoup plus loin qu'à une centaine de kilomètres du Québec, avec des bastions acadiens et franco-ontariens qui peinent à survivre. Et non, le Canada est comme l'Empire romain dans Astérix, et certains irréductibles se battent avec ardeur pour préserver leur droit de parler français ailleurs au Canada. Ici, ils s'appellent les Fransaskois. (avouez que c'est pas mal plus cool que franco-saskatchewanais, mot qui pourrait à lui seul tuer tout espoir de parler français ici). Il y a des organisations fransaskoises, comme l'ACF, qui s'occupe de la fransaskoisie partout en Saskatchewan. Puis, différentes villes, comme Regina, Moose Jaw et Prince Albert ont leurs propres associations qui contribuent au maintien de la langue française dans la province.

Des exemples? Pendant le festival Mosaïc de Regina, la francophonie avait son propre pavillon où on pouvait écouter de la musique franco, manger de la poutine et boire de la bière québécoise (!) d'importation. À la Saint-Jean, célébration de la francophonie au pavillon français. Exemple empirique, maintenant: quand je suis arrivé, je me disais que j'allais jamais entendre parler français au-delà de mes quelques relations ici et à la tivi, mais c'est faux. Bon, je dis pas que c'est Paris, mais plus souvent qu'à mon tour, au moins une fois par semaine, j'entends parler la langue de Voltaire (sans les attaques gratuites contre Rousseau) à l'épicerie, dans la rue, etc.

3) C'est pas comme s'il y avait des concentrations de francophones en Saskatchewan

Dans des villes et villages comme Gravelbourg, Bellegarde, Willow Bunch et Zénon Park (à prononcer en français, journaliste de Radio-Canada Montréal qui fait un reportage sur ZENNONE PARK gros comme le bras. C'est prononcé ZAINON PARQUE. ZAINON PARQUE. Merci). Il est tout à fait possible de vivre en français, puisque la majorité des gens de ces endroits parlent la langue de Rabelais (sans la vulgarité et les blagues de scatophilie avec des moutons). Bon, d'accord, j'y suis pas encore allé (c'est dans mes plans), mais j'ai rencontré des gars de Zénon Park qui me l'ont dit. Tout comme -.-

4) Dude, j'irai pas élever ma famille en français en Saskatchewan, c'est genre impossible

C'est tout à fait possible d'éduquer sa famille en français, ici, grâce aux 12 écoles gérées par le Conseil des écoles fransaskoises, un peu partout en province. On y trouve des enseignants qui ont eux-mêmes souvent été éduqués dans ces écoles, et tout plein de petits fransaskois d'ici et d'ailleurs, parce qu'il faut dire que la communauté francophone saskatchewannaise est très diversifiée. L'université de Regina possède également une branche nommée l'Institut Français qui offre un baccalauréat en études françaises, une maîtrise en éducation française, un certificat en français langue seconde et un éventail de cours (biologie, histoire, histoire de l'art, mathématiques, etc.) en français. Pas si mal, hein, pour une province située à plus de 2000 kilomètres du bastion principal de la langue de Céline (sans les divagations antisémites).

Alors, voilà. Je pense pas que j'ai convaincu personne de venir s'établir ici, mais ça vaut la peine de dire qu'il y a d'autres communautés francophones ailleurs qu'au Québec, et que ces communautés méritent d'être connues un peu mieux. Et non, je ne suis pas payé par le conseil d'immigration francophone de Saskatchewan, si un tel organisme existe. Quoiqu'un chèque de 20 dollars serait apprécié. Vous savez où me trouver -.-

3 commentaires:

rachel a dit…

Super bon article! Par contre, je ne suis pas certaine à propos de tes arguments pour le mythe numéro 4. Si plusieurs profs d'immersion française dans les maritimes ne maitrisent pas vraiment le français, j'ai des doutes quant à la qualité de l'éducation en Saskatchewan, où la proportion de francophones est encore bcp moins élevée. Quand tu dis "On y trouve des enseignants qui ont eux-mêmes souvent été éduqués dans ces écoles", c'est plus inquiétant qu'autre chose à mon avis. Mais bon, Kerouac a appris le français en vivant aux États et en parlant seulement avec sa mère, alors tout est possible.

rachel a dit…

Question: Les gens dans les associations francophones, c'est qui? Des immigrants de pays francophones? des Québécois qui sont là temporairement? ou des fransaskois/canadiens-francais d'origine?

La Tache a dit…

@Rachel:

J'ai jasé avec le directeur de l'école primaire qui parle un français, ben, genre, de Québécois sans l'être, un français que tu entendrais à Boucherville, Sorel ou Québec, là, ainsi qu'avec 2-3 profs du primaire et secondaire de Regina, qui, malgré un accent anglo, parlaient un très bon français. Je sais pas pour les autres villes, mais ici ça va, honnêtement. Les fransaskois ont un solide français pur, qui n'est pas vraiment teinté par l'anglais, et ils en sont fiers.

Pour les assos, c'est un mélange de gens d'ici et de nouveaux immigrants, qui proviennent principalement d'Afrique. J'ai pas vu tant de Québécois d'origine.

Merci pour ton commentaire, je savais que cet article allait probablement te plaire ;o)